Au Suriname, un artiste ndyuka se bat pour le renouveau des arts visuels dans une région meurtrie par les souvenirs de la guerre civile.
Moengo est une ville de 13 000 habitants située à 40 kilomètres d’Albina, ville séparée de la Guyane par le Maroni. Marcel Pinas, enfant du pays devenu un artiste reconnu sur la scène contemporaine internationale se bat contre l’injustice et l’acculturation. Jusqu’en 1986, la région était habitée par de fameux menuisiers, de patientes brodeuses, beaucoup de faiseurs d’abattis et encore plus d’enfants. Quand éclatent les affrontements entre la junte de Desi Bouterse (auteur d’un coup d’État cinq ans plus tôt) et un de ses anciens gardes du corps, le Ndyuka Ronnie Brunswijk, la zone devient l’épicentre de la contestation, et les villageois, le contingent du commando qui tente de renverser la dictature. L’horreur dura sans relâche jusqu’en 1992. Puis plus rien. Demeure l’insoutenable amnésie d’une nation. Brunswijk est mené à l’Assemblée nationale en 2000, Bouterse devient chef de l’État en 2010. Depuis trente ans, Moengo fait ce qu’elle peut pour se relever, emportée par la mainmise de Suralco, société américaine de production d’aluminium, le désintérêt du gouvernement et les temps modernes : mondialisation, inégalités sociales, criminalité. « Une nouvelle culture a grandi. Les gens sont traumatisés et il n’y a aucun service public, aucune aide médicale pour les aider. Nous utilisons l’art et la culture comme thérapie », explique Marcel Pinas, qui a pu échapper à la guerre civile grâce à ses études supérieures entamées une......